Poussire Et Dbris De Verre - Tumblr Posts
Effraction
« Viens, on peut entrer par là.
— T’es sûr ?
— Mais oui, fais pas ta poule mouillée, allez viens !
Ben a très envie de faire demi-tour, là tout de suite. La maison abandonnée est sinistre, et même si ce n’est pas eux qui cassé la fenêtre, c’est quand même une effraction. Il aurait dit non à n’importe qui.
Mais ce n’est pas n’importe qui qui lui demande, c’est Nathan, ils sont seuls tous les deux, ils sont partis à l’aventure, et Ben sait qu’il est prêt à faire n’importe quoi.
Pas de chance, n’importe quoi, c’est exactement le plan de son ami.
Ils entrent en se faufilant avec précaution par la vitre brisée, prenant garde à ne pas se couper sur le verre. À l’intérieur, une petite mare de boue, là où la pluie s’est mêlée à la saleté de la maison, et des tonnes de poussière. À peine arrivé, Ben se met à éternuer comme un perdu, sous les éclats de rire de Nathan.
— Bon, au moins les fantômes savent qu’on est arrivés maintenant…
Nathan le taquine, à la fois pour le bruit et pour sa peur des fantômes. Il a l’air ravi d’être ici. Ce qui laisse Ben un peu perplexe. C’est une horrible vieille maison abandonnée, dégoûtante et pleine d’araignées, voire de rats, et peut-être même hantée. Il n’y a rien d’amusant à y faire, à part passer de pièce en pièce en évitant de toucher les murs pour ne pas attraper le tétanos. Qu’est-ce qu’ils font là ?
Ils avancent. Il y a quelques tags, mais pas beaucoup. La maison n’a pas intéressé les squatteurs visiblement. Tout ce qui pouvait être intéressant a déjà été pillé, les objets restants, vieux et cassés, ont été jetés en vrac à droite et à gauche. Nathan fouine, essuie la poussière qui macule une vieille poupée au crâne fendu, la fait parler comme un mauvais ventriloque :
— Saluuut, Ben ! Je suis Jessica la poupée hantée, je suis te-lle-ment contente de te rencontrer ! Fais-moi un bisou !
Ben attrape le poignet de son ami et le débarrasse de la poupée avant que celui-ci ait pu la rapprocher. Ҫa n’a rien de difficile pour lui, il est beaucoup plus grand et plus fort que Nathan, au grand dam de celui-ci. C’est le plus petit des deux qui s’est révélé être un casse-cou intrépide. Qui se met toujours dans les ennuis. Qui aimerait tellement avoir la carrure de badass qui irait avec son caractère.
Mais il est mignon comme ça. Selon Ben, qui refuse de le lui dire. Ҫa serait… il n’a pas envie d’y réfléchir. C’est effrayant, c’est tout.
Presque aussi effrayant que cette maison, qui lui tape de plus en plus sur les nerfs.
Il sursaute en entendant un grincement et se retourne. Non, rien, bien sûr, mais son cœur bat la chamade et il commence à se sentir mal. Vivement la fin de…
— Hé, ça va ? demande Nathan.
Il a beau plaisanter sur les fantômes et tout le reste, Nath ne le pousserait pas jusqu’à ce qu’il ait vraiment peur. Ce n’est pas son genre.
— Ҫa va, ça v… Oh putain, là !
— Quoi, là ?
— Dans le miroir ! J’ai vu bouger !
— C’est rien, c’était sûrement les rideaux ou…
— J’ai vu bouger !
La voix de Ben s’est perchée dans les aigus tandis qu’il guette de tous les côtés à la recherche de l’ombre. Il ne l’a vue que du coin de l’œil, mais il l’a bien vue, sûr et certain ! Et les esprits ne s’en prennent pas aux sceptiques, c’est bien connu, alors c’est sans aucun doute lui qui va…
— Ben ! s’exclame Nathan en lui attrapant les deux bras. Ben, regarde-moi !
Ben commence à paniquer, il guette de tous les côtés la créature qui rôde sans doute, il sent son sang pulser jusque dans ses temps et sa vision s’étrécir. Nathan répète avec autorité :
— Ben, regarde-moi ! Parle-moi !
— Je… je te jure que…
— Oui, je sais que tu as vu quelque chose, et peut-être qu’on ne saura jamais vraiment ce que c’est, mais ce qui est sûr c’est que ce n’est pas dangereux. Il n’y a rien de dangereux ici. Jamais je ne t’aurais emmené dans un endroit dangereux, d’accord ?
— Tu…
— Tu as confiance en moi ?
— Ou… ouais…
— Regarde-moi. Comme ça, très bien. Respire lentement. Avec moi.
Ben préférerait guetter le fantôme qui se prépare à l’attaquer, mais il obéit à son ami, perdu dans son regard si intense, suit son rythme de respiration, et peu à peu s’apaise. Oui, il lui fait confiance, aveuglément.
Peu à peu ses sens reviennent à la normale. Son rythme cardiaque aussi. Il faut encore un temps avant que ses muscles ne finissent aussi par se décontracter, et enfin il lâche les bras de Nathan avec un petit sourire.
— Ҫa va mieux. Merc…
Il n’a pas le temps de finir. Nathan lui a attrapé la nuque et l’embrasse à pleine bouche.
Puis s’écarte.
Ils restent silencieux quelques instants, laissant l’évènement flotter entre eux, comme si en évitant de parler ils pouvaient encore décider si c’était vraiment arrivé ou non.
Puis Nathan soupire :
— Désolé… Je voulais faire un truc pour t’impressionner. Tu sais, genre le gars qui a peur de rien. Je pensais pas que tu flipperais vraiment. Pardon.
— Tu… t’as… quoi ?
— Tu t’y attendais vraiment pas ? Je pensais que tu le savais. Tout le monde le sait.
— Sait quoi ?
— Que je suis amoureux de toi. »
Ben ne le savait pas, non, il ne s’est jamais autorisé à l’imaginer, et il aura des millions de questions à poser – plus tard. Pour l’instant, il l’embrasse à nouveau, comme la réponse où il serait certain de ne pas se tromper à une question qu’il ne peut pas formuler.